Le Brouillon




Résumé

Daniel est encore jeune lorsque son père, libraire, l’emmène dans le cimetière des livres oubliés. Là, il choisit un livre qu’il va sauver et fera revivre : l’Ombre du vent, écrit par Julian Carax. Mais il découvre peu à peu que l’auteur a été maudit, et il va se lancer sur l’histoire de ce jeune homme, dont les ressemblances avec Daniel vont se préciser...


Critique

De la belle ouvrage, comme on dit. Un roman dans une atmosphère brumeuse, de lieu hanté ou presque, de gens maudits, dans la Barcelone de l’après-guerre, mais qui subit déjà les affres de la guerre civile, ou du moins ses balbutiements.

Un livre imposant, fort de la multiplication des intrigues et des personnages, des histoires parallèles, mais surtout empreint de mystère et réellement envoûtant.

Roman assez complet, on y retrouve un aspect fantastique, du pseudo-policier, du roman historique, où Zafon mêle les malheurs liés à la guerre civile à l’intrigue, un roman de vie avec l’apprentissage de l’amour et de l’amitié ; parfois un peu stéréotypé, car tous les "standards" sont représentés ou presque : le flic véreux, l’écrivain maudit, la femme fatale, le clochard au cœur tendre...

C’est un livre fort en sentiments, où tous sont exacerbés (l’amour, la haine, la jalousie, la peur), où le parallèle entre l’écrivain et Daniel est bien mis en relief et s’intensifie, avec des passages très drôles et limite clownesques, et même si l’on peut regretter certains passages "fleur bleue", c’est une écriture de qualité, sans lourdeurs syntaxiques, intéressante mais parfois niaise (mais un adolescent en pleine découverte de lui-même et du monde n’est-il pas niais, parfois ?).


Daniel a lu l’Ombre du vent, cela a bousculé sa vie ; nous avons tous lu un livre haletant, perturbant, saisissant, qui bouscule nos idées reçues ou tout simplement qui nous empêche de dormir avant d’avoir parcouru les ultimes lignes. Alors on ne peut que comprendre, sympathiser avec ce jeune homme qui, dans la curiosité de son adolescence, va découvrir sa ville, sa vie, l’histoire de personnes dont le destin a été sombre ou tragique, et qui grandira, mûrira grâce à ces acquis. Une belle histoire, un bel apprentissage.

L’auteur aime à raconter des histoires, et ça se voit.


Extrait

"Je me souviens encore de ce petit matin où mon père m'emmena pour la première fois visiter le Cimetière des Livres Oubliés. Nous étions aux premiers jours de l'été 1945, et nous marchions dans les rues d'une Barcelone écrasée sous un ciel de cendre et un soleil fuligineux qui se répandait sur la ville comme une coulée de cuivre liquide.
- Daniel, me prévint mon père, ce que tu vas voir aujourd'hui, tu ne dois en parler à personne. Pas même à ton ami Tomás. A personne.
- Pas même à maman ? demandai-je à mi-voix.
Mon père soupira, en se réfugiant derrière ce sourire triste qui accompagnait toute sa vie comme une ombre.
- Si, bien sûr, répondit-il en baissant la tête. Pour elle, nous n'avons pas de secrets. Elle, on peut tout lui dire."


L'Ombre du vent, Carlos Ruiz Zafon. Editions Livre de Poche, page 9.


~Melaquablue~ le 05-11-2009 à 10:04
 
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