Histoire de l'espionnage français (partie 2)

Voilà la suite ! Je m'arrête à la veille de la seconde guerre mondiale (ça se complique tellement après...)


Après 1815, l'instauration d'une monarchie parlementaire développe un souci de transparence dans les affaires de l'Etat. Ce qui entraîne bien entendu un contrôle des activités "secrètes" (ça doit être agaçant de bosser sur un dossier top secret avec quelqu'un regardant constamment par dessus ton épaule...), plus un contrôle de l'emploi des fonds réservés jusque-là à l'usage exclusif du monarque. Ainsi, les services de renseignements et "secrets du Roy" passent peu à peu sous le contrôle direct du gouvernement (répartis entre Police, Guerre et Affaires Etrangères) Les services secrets deviennent donc une INSTITUTION D'ETAT . Très vite, les chefs d'Etat, du gouvernement, et les ministres constituent des petites cellules pour les renseigner directement.

Après la guerre de 1870 où les services secrets ont été particulièrement déficients, on met en place des organes permanents de renseignement en s'inspirant de l'organisation de l'armée prussienne et de celle préconisée par Napoléon I (comme quoi ...) On crée 4 bureaux (attention les choses se compliquent à partir de maintenant...)
- le 2ème Bureau : Renseignement général
- Bureau des Statistiques militaire (BSM), supervisé par le 2ème Bureau qui s'occupe surtout de la topographie.

  • Bureau des reconnaissances (quelques postes à l'Est de la France dont des bureaux de premières lignes pour diriger les informateurs sur le terrain)
- Section du renseignement 1876 : création de la Section de statistiques militaires et de reconnaissances militaires.

Parallèlement, le ministre des Affaires Etrangères possède le Bureau des affaires secrètes (ou 2ème division) qui est en liaison avec le Bureau du chiffre. Bien sûr, la réforme entraîne la mise en oeuvre d'un nouveau concept du renseignement français : le contre-espionnage est reconnu comme une activité à part entière (un grand pas pour les services secrets).

1878 : la Section du renseignement est rattachée directement à l'état major général et rebaptisée Service Spécial de renseignement

1887 : Le ministre de la Guerre (Boulanger) nomme Adalbert-Henri Foulcaut de Mondion aux côté du colonel Vincent, nouveau chef du 2ème Bureau. De plus, on diffuse une instruction particulière sur la fonction du renseignement en temps de paix et de guerre, en précisant que la recherche et l'exploitation du renseignement à l'étranger et sur le territoire français seront assurés par le SR du ministère de la Guerre.
On crée deux fichiers :
  • pour les étrangers résidents en âge d'être mobilisés, susceptible de mener des action d'espionnage contre la France (carnet A) ;
  • pour les français soupçonnés d'espionnage (carnet B).

Pendant deux ans, Adalbert tente de mettre en place une organisation générale de COORDINATION du renseignement et du contre-espionnage français (qui hélas ne survivra pas à son départ....). Le ministre de l'Intérieur entreprend tout pour récupérer le contre-espionnage au détriment du ministre de la Guerre (serait-ce l'origine historique du conflit ?)

1893 : les missions des commissaires frontières et chemins de fer (soumis à l'autorité des préfets) sont élargies au renseignement politique.

1894 : Affaire Dreyfus, qui selon mes sources (secrètes) aurait été victime d'une machination montée par un officier du 2ème Bureau (intox ou vérité?)

Automne 95 : le nouveau chef du 2ème bureau Georges Picquart tente de résoudre l'affaire, ce qui gêne tout le monde : on le remplace donc par Henry. Picquart est accusé de divulgation de secrets militaires, il est mis aux arrêts pendant plusieurs mois.

1899 : le contre-espionnage étant traumatisé par l'affaire, on le confie enfin au ministère de l'Intérieur pour qu'il se remette de ses émotions.

1mai 1899 : le ministre de la Guerre, le général Gallifet supervise le Service de surveillance du territoire (SST), qui est officiellement chargé de la traque des espions étrangers sur le sol national. Première conséquence, le contre-espionnage est à la charge des commissaires spéciaux de la Sureté.

1906 : Clémenceau devient le président du Conseil tout en conservant le ministère de l'Intérieur. Le commissaire Hennion est nommé à la tête des brigades mobiles chargées d'enquêter sur les affaires spéciales de police judiciaire et de contre-espionnage (les fameuses brigades du Tigre) .

1907 : Le 2ème bureau de l'état major redevient opérationnel en recouvrant en partie des missions de contre-espionnage dont il avait la charge avant l'affaire Dreyfus--> le 2ème Bureau travaille avec l'Intérieur.

1914 : Le 2ème Bureau, dirigé par le général Charles Joseph Dupont, est devenu une structure relativement importante malgré des effectifs modestes. Il possède de nombreux postes le long des frontières. Le services du chiffre réussit à casser le code des transmissions allemandes.

Mai 1915 : une note ministérielle fixe la nouvelle organisation de service de renseignement, basée sur la centralisation et la coordination :
  • SCR : Section de centralisation des renseignements est constituée sous la responsabilité du colonel Henri Lainey, il est chargé de réunir les informations de contre espionnage recueillies par les Bureaux centraux de Renseignement (BCR) installés dans chaque régions. Plusieurs fonctionnaires de police sont détachés auprès de la nouvelle Sûreté des Armées.

Automne 1915 : création d'un 5ème Bureau chargé de superviser les missions de la Section de centralisation du renseignement (SCR) et de la SR du 2ème Bureau, ainsi que le contrôle postal, la censure et la propagande. Face aux effectifs et aux fronts, les services de renseignement sont appelés à contourner les champs de bataille en ouvrant des bases de recherche (surtout en Suisse et en Hollande) inaugurant l'installation de postes à l'étranger (à ce sujet, lire le livre de Joseph Crozier : "Mes missions secrètes 1915-1918"). Ils doivent toutefois faire face à des difficultés pour transmettre car les moyens de liaison sont peu performants.

Septembre 1915 : création d'un bureau interallié chargé de coordonner l'échange de renseignements entre les services des pays alliés contre l'Allemagne (un des célèbres agents du 2ème Bureau est Marthe Richer dit Richard, et une des plus grandes réussites française est la récupération d'informations sur les gaz de combats que les Allemands se préparaient à utiliser).

Février 1917 : les 5ème et 2ème Bureau sont effectivement placés sous l'autorité des colonels Goubet et Cointet. Comme ils n'ont pas les moyens de remplir la mission initiale de tout contrôler, le 5ème Bureau se limite à l'action psychologique--> plus grande autonomie du 2ème Bureau.

1918 : la centralisation des renseignements est confiée au Commissariat à la Sûreté nationale rattaché directement à l'autorité personnel du président du Conseil (le chef du gouvernement) --> le renseignement français est pris en considération par le pouvoir politique mais il n'obtient pas davantage de moyens pour remplir efficacement sa mission. Après la 1ère Guerre Mondiale, le 5ème Bureau est dissous, le 2ème Bureau de l'état major de l'armée reprend le contrôle complet de la SR et de la SCR ainsi que de la Section du chiffre. La Sûreté générale crée une brigade spéciale chargée de la surveillance des étrangers soupçonnés d'espionnage.

18 aout 1923 : note interne destinée à rassurer les membres du Quai d'Orasy, inquiets de voir certains d'entre eux mêlés à des activités d'espionnage....

1er octobre 1924 : le ministre de l'Intérieur signe l'instruction secrète 7000 qui permet au 2ème Bureau d'obtenir l'appui de la préfecture de police et la collaboration de près de 70 commissaires spéciaux (remarquez l'omniprésnece du chiffre 7....) ; la section du renseignement devient Service de Renseignement (SR). Comme il y a toujours peu de moyens(...) le SR Guerre ne peut pas être présent partout dans le monde mais uniquement dans les principaux pays de l'empire colonial français et dans les "grandes ambassades d'Europe". Dans plusieurs pays, le représentant du SR est en relation avec les services de renseignement locaux.

1934 : renforcement en moyens humains, matériels et juridiques (pas trop tôt !) pour la mission des services de contre-espionnage. En avril est créée une direction générale de la Sûreté, et Charles Cotoni prend la direction de la Surveillance du territoire. Les nouveaux effectifs des bureaux de la surveillance du territoire (BST) sont installés dans les grandes villes proches des frontières, camouflés au sein de divers bureaux d'études. Dans chaque région militaire, on renforce les BCR.

Juin 1936 : le colonel Louis Rivet prend la direction du Service des renseignements et du SCR. Le siège est installé au 2bis avenue de Tourville d'où le surnom de 2bis. Guy Schlesser supervise le SCR et développe l'aspect offensif du contre-espionnage.

Mars 1937 : le gouvernement de Léon Blum fait du "Contrôle général des services de surveillance du territoire " une structure indépendante des autres services de police. 10 commissaires spéciaux de surveillance du territoire sont recrutés en sus des BST déjà existants. Le Service d'information de la Sûreté est transformé en direction des renseignement généraux. On crée également un service de renseignements intercolonial (SRI).

10 février 1939 : décret signé pour mettre un terme aux querelles causées par l'imprécision de la répartition des tâches. A la veille de la seconde Guerre mondiale, le SR français, malgré des moyens insuffisants, est très bien informé sur les intentions des chefs politiques et militaires allemands et sur le potentiel des armées. Plusieurs réseaux d'espionnage allemands montés par le RSHA du colonel Walter Schellemberg sont très surveillés. De nombreux postes SR à l'étranger ont des échanges avec leurs homologues locaux( britanniques, roumains, tchécoslovaques...) notamment dans le domaine des interceptions et du décryptage de plusieurs plans d'attaques de la Wehrmacht......

Malheureusement une fois de plus ils ne seront pas écoutés par les états majors français.

 
 
~jamesB~ Publié le : 04/02/2006

 

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Ca c'est un article détaillé, on peut le dire... J'espère simplement que tu ne rebuteras pas les gens avec cette montagne d'informations^^
Tu liras dans mon message les autres remarques que je fais et que les autres n'ont pas besoin de savoir...
Bravo pour ton courage, il faut en avoir pour rédiger un si long texte! Mais à ce qu'il paraît tu es fan d'espionnage



~Darkiliane Suky~ le 00-00-0000 à 00:00
 
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