Petit djihâd

Cet article n'a pas la prétention d'expliquer le concept de Djihâd tel qu'il est défini à l'heure actuelle, mais d'expliquer son fondement originel au Moyen-Age, et en particulier par le biais de la situation chrétiens/ musulmans en péninsule ibérique.


Cet article est à mettre en parallèle avec celui de la guerre sainte chrétienne. Je me suis basée sur des lettres de grands chefs politiques et religieux du XI-XIIe siècle et sur le Coran.

Petit rappel historique

Les musulmans sont arrivés en péninsule ibérique en 711. Le survivant de la dynastie Omeyyade fonde l'émirat de Cordoue en 756. Les Omeyyades sont éliminés en 1031 après une période de guerre civile et la-Andalus se divise en une multitude de "principautés" que l'on appelle taifas. A partir de 1080, le souverain Castillan Alphonse VI menace de plus en plus ces taifas et leur impose un lourd tribut. Les taifas font alors appel à la dynastie Almoravide qui bat Alphonse VI lors de la bataille de Zallaqas en 1086. Cette dynastie conquiert la péninsule, mais ils sont rapidement chassés par les Almohades, un mouvement religieux qui se politise.

AL ANDALUS : désigne la partie musulmane de la péninsule ibérique quelle que soit sa taille.

Lors des premiers affrontement entre chrétiens et musulmans, la guerre n'est pas encore perçue comme une guerre sainte. Ce sont surtout des affrontements qui ont pour but la conquête des terres, et la richesse. Ce n'est que petit à petit, à partir du XIè siècle, que les affrontements sont de plus en plus perçus comme des combats pour la religion.


1. La guerre sainte

" Djihâd " est traduit ici par l'expression de guerre sainte. Cela signifie un effort vers Dieu.
Il existe deux types de djihâd : un grand djihâd et un petit. Le grand est l'effort spirituel pour atteindre Dieu tandis que le petit signifie conflit, guerre, armée contre l'agresseur religieux.
" La guerre s'adresse à tout ce qui est capable de lutter, effet mobilisateur : " nous joindrions nos efforts pour combattre les chrétiens avec son concours "
" Le Très Haut a rendu obligatoire le djihâd pour tous les musulmans "

Il y a de plus une Dimension sacrée : le djihâd confère un privilège de nature religieuse. IL est également considéré comme une démarche de martyr.
" Ceux d'entre nous qui survivraient se couvriraient de gloire à l'ombre de sa protection ; ceux qui succomberaient tomberaient en martyrs de la foi. "
" Nous partîmes à la rencontre de la mort et que personne ne peut éviter en disant " voici notre dernier jour en ce monde, nous mourrons martyrs. " (Lettre de Ibn Tashfin à l'émir de Mahdiyâ après la victoire de Zallaqâs en 1086)
C'est donc un don de soi, un sacrifice.

2. Références théologiques

Le djihâd est défini dans le Coran. C'est une guerre sainte qui apparaît dans la biographie même de Mahomet, qui a été un chef de guerre autant qu'un chef spirituel. C'est un effort vers Dieu, voire même une obligation religieuse pour les musulmans.
Pour les shiites, le djihâd est une des 6 piliers fondamentaux. C'est une obligation collective.

Conception générale du monde :

  • Dar al-Islam : domaine de l'Islam
  • Dar al Harb : domaine de la guerre
Le premier doit conquérir le deuxième par le djihâd. C'est une conception théorique.
Il y a eut une théorisation du djihâd au IXe siècle, une mise par écrit tardive au moment de l'essoufflement des premières conquêtes.

3. La clef de l'ennemi religieux

Il s'agit de combattre tous les infidèles, les mécréants qui ne croient pas en Dieu.
Chez les musulmans, le sort des ennemis vaincus est l'humiliation, la reconnaissance de la domination de l'Islam et d'un pouvoir musulman, sous la forme d'un tribut, d'un impôt spécifique pour les juifs et les chrétiens. C'est une tolérance qui ne s'applique qu'aux religions monothéistes (sur la base d'un livre) = dhimmis ( mot qui désigne les chrétiens et les juifs qui habitent un pays d'Islam, et qui ont un statut juridique spécial. Pas de conversion forcée !)

4. Objectif du djihâd

La guerre sainte doit s'appliquer entre les musulmans eux-mêmes, alors que ce n'est pas le cas dans les textes saints (seulement une lutte entre les musulmans et les non musulmans). Les autres formes de guerre ne sont pas possibles. Il y a donc une instrumentalisation de la notion de djihâd qui devient alors plus politique.
" Combattre les Almoravides est une obligation religieuse pour la plupart d'entre vous pour ceux qui sont capable de lutter " (lettre de Ibn Tumard, à la tête du mouvement religieux Almohade)

 
 
~jamesB~ Publié le : 19/02/2007

 

En cas de conflit avec cet article (problème de droits d'auteur, etc.) vous pouvez en demander la suppression auprès d'un administrateur du site.

Pour compléter cet article, je pense qu'il serait judicieux de distinguer le "grand" jihâd, du "petit" jihâd. Ce dernier fut clairement expliqué par jamesB.
Mais le grand jihâd, al-jihâd nafsi, est considéré par les musulmans comme étant le moyen d'effectuer un travail psychologique sur soi, dans le but d'éviter tous les écarts de conduite et de savoir-vivre, comme par exemple le fait de se plaindre, d'insulter, de se battre... Ainsi le jihâd n'est pas qu'une affaire de guerre, mais un moyen de se remettre constamment en question.


~azmah~

 

Je l'ai (très) rapidement évoqué dans le 1. Mais comme ici, ce qui m'intéressait, c'était le petit, je n'en ai pas vraiment parlé. ;)
Toutefois, azmah, tu as bien fait de le rappeler ! Et grâce à toi, je viens de réaliser que le grand djihâd est très proche de la doctrine bouddhiste des quatre nobles vérités. En bref, pour se libérer du cycle des réincarnations et aboutir à l'extinction totale (nirvana), les moines exercent un travail sur eux-mêmes (comme pour les musulmans) et s'abstiennent (enfin ils tentent de s'abstenir) de tout péché du corps (les actes), de la voix (injures...) et de la pensée. S'ils y parviennent, ils sont totalement détachés du monde et des événements, ils sont neutres en quelque sorte, évitant ainsi la douleur et les malheurs (également le bonheur, mais c'est pour la bonne cause).

Je suppose que ce travail sur soi que représente le grand djihâd doit trouver ses équivalents dans les autres religions. Il serait intéressant de les comparer et de voir les différences, les points communs... A creuser !


~jamesB~

 

Jihad ne veut pas dire guerre. La langue arabe a des subtilités... Jihad veut dire à peu près lutte, lutte interne...
Mais il a malheureusement été interprété par "massacre" par les intégristes. C'est dommage de voir une société appelée à la fin de la modernisation décadente alors qu'elle était bien plus moderne que nous l'étions !

~BlackXamarylliS~

 

Notez aussi que Le petit Jihâd ne peut avoir lieu qu'en terre d'Islam pour expulser des envahisseurs. La "reconquête islamique" est un mythe. Lire à ce propos le monde diplomatique de janvier 2010. Les "conquêtes islamiques historiques globales" n'ont pas été du "petit Jihâd". Les "conquêtes islamiques historiques globales" sont appelées "Al foutouhatou Al Islamiya" en arabe. Ce que l'on pourrait littéralement traduire par "ouvertures pacifiques à la soumission à Dieu".

~san_taj~

 

Il faut être membre du site afin de pouvoir rajouter un complément d'information sur un article.