Schizophrénie

Voilà un mot que tout le monde connaît ! Malheureusement, son sens et sa signification restent souvent obscurs, et sont source de clichés infondés...


La schizophrénie... Souvent rattachée voire confondue avec le trouble de la personnalité multiple, elle reste une pathologie psychiatrique mystérieuse et complexe.

D'un point de vue étymologique, ce mot fut créé en 1911 par Bleuler, éminent psychiatre helvétique. Schizophrénie est la compression (je trouve plus le terme exact) des mots grecs schizein (cliver, scinder) et phrên (esprit). En immisçant ce mot en psychiatrie, Bleuler tend à démontrer ce qui constitue pour lui le symptôme principal de cette maladie : la Spaltung (la dissociation).

il s'agit pour lui non pas la dissociation de la personnalité (ceci est un autre registre des pathologies psychiatriques), mais de l'unité psychique. Autrement dit, on assiste à une fragmentation anormale de la pensée, des propos et du comportement.

Cependant, l'ensemble des cliniciens, parfois en désaccord sur le concept psychopathologique, ont su trouver un terrain d'entente sur la méthode de diagnostic de la schizophrénie. Le symptôme de dissociation ne suffit pas, à lui seul, à poser un tel diagnostic. La présence des 4 symptômes (au minimum) suivants doit être établie et vérifiée :

1. La dissociation
2. La discordance
3. L'ambivalence
4. L'autisme

La discordance est le résultat d'une perte d'harmonie et d'unité de l'ensemble de l'activité mentale. Les mots et les propos n'expriment plus la pensée du patient. Les différentes manifestations de la discordance sont par exemple le néologisme (inventer de nouveaux mots), le verbalisme (excès de parole qui n'amène rien de concret), l'écholalie (répéter sans cesse des mots ou des phrases) et j'en passe.

L'ambivalence correspond à l'association de notions souvent contraires, dans le domaine sentimental et affectif.

L'autisme, dans la notion de schizophrénie, est à la fois un repli sur soi-même et une fuite de la réalité. On remarque que la discordance, l'ambivalence et l'autisme sont en quelque sorte les manifestations cliniques de la dissociation.

L'ensemble des symptômes de la schizophrénie (en plus des 4 généraux) sont classés en symptômes négatifs (qui marquent un appauvrissement émotionnel et intellectuel), et positifs (qui rajoutent au fonctionnement habituel du sujet).

Symptômes positifs :
délires, hallucination, incohérence du langage ;

Symptôme négatifs :
affect aplati, alogie, apathie, diminution de la sociabilité, déficit d'attention.


Enfin, pour terminer, l'étiologie de cette maladie reste un point sombre et mystérieux de la psychiatrie. Une seule certitude : sa cause est multifactorielle. Plusieurs hypothèses ont été avancées : une origine génétique (présence de gènes incriminés), biochimique (dérèglement dopaminergique), et enfin psychanalytique (dysfonctions du Moi et de construction de la personnalité). Cette liste n'est de loin pas exhaustive, mais ce sont les pistes les plus sérieuses et les plus importantes à l'heure actuelle.

Voilà, en espérant que ce petit article ait permis à certains de mieux connaître cette maladie qui touche quand même 0.7% de la population mondiale...

 
 
~Eldarion~
Publié le : 20/11/2007

 

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Salut!

Merci à vous! ;o)

Eragon, je vais compléter l'article sur les traitements. Mais c'est un pan important de cette maladie. Le traitement est complexe, et combine médicaments, psychothérapie ou psychanalyse, selon le courant de l'institution, et la mise en place de différents cadres thérapeutiques.

Je me permets une ou deux précisions. Un schizophrène ne guérit jamais. La schizophrénie, d'un point de vue nosologique, est un type particulier de psychose. La psychose est un trouble psychiatrique caractéristique d'une structure de personnalité appelée psychotique.
Or, une structure de personnalité est irréversible. Elle apparaît lors du développement de l'enfant (je préciserai ce point dans la suite de l'article).
En gros, tu as une structure psychotique, névrotique ou état-limite à vie. Donc, un schizophrène peut uniquement être "compensé".

Pour imager mes propos : un verre cassé peut être recollé. Mais il restera toujours fragilisé et, à tout moment, il est susceptible de se rebriser. C'est identique pour le schizophrène. Les traitements peuvent le stabiliser, mais il restera toujours une possibilité de le voire décompenser.

Deuxièmement, et j'insiste sur ce point, toute personne souffrant de schizophrénie est susceptible de devenir agressive et dangereuse. Sa perception du monde varie et il lui arrive de perdre contact avec la réalité.
On dit alors que le patient est en crise. A ce moment, la moindre perception d'un événement, d'une parole ou d'un acte peut être interprétée comme une menace potentielle. L'agressivité et la violence sont alors (souvent) les seuls mécanismes de défense courants. Il est bien sûr possible de désarmorcer cette crise, à condition de bénéficier d'un savoir et de compétences hors pairs et d'être formé à ces fins.

Enfin, tu parles d'une espérance de vie moindre que la population générale. Oui et non. Physiologiquement parlant, un schizophrène a la même espérance de vie qu'une personne saine.
D'un point de vue statistique, ils vivent moins longtemps que la moyenne pour une seule et unique raison: le risque accru de suicide lors de ces moments de crise. En définitive, je dirai donc que la maladie n'a pas d'incidence directe sur l'espérance de vie.

Travaillant de manière régulière avec des patients schizophrènes, je me permettrais de rajouter que ces personnes sont souvent incomprises et mises à l'écart, mais rarement victimes de violence. On craint ce qu'on ne comprend pas... Et généralement, on s'attaque rarement à ce que l'on craint... Voilà pour le mot de la fin.

Mais promis, je me mets à l'instant sur un complément à l'article qui mettra en lumière certains côtés obscurs que tu as soulevé.

Amicalement et en espérant avoir été compréhensif, El.


~Eldarion~

 

Voilà, chose promise, chose due !

Je commence par le plus gros morceau : l'aspect thérapeutique. Ce dernier se base principalement sur 3 axes : le traitement psychologique, le traitement social et le traitement biologique. Je tiens à préciser que cette précision est massive et peut présenter quelques effets indigestes... Mais bon, c'est sur demande. :o)

  • Le traitement psychologique
Aborder cet aspect du traitement de manière exhaustive reviendrait à vider le tonneau des Danaïdes. Il existe autant de formes de thérapie que de mouvements de pensée en psychologie. Les moyens diffèrent donc, mais les fins recherchées sont généralement identiques.

Par exemple, la thérapie individuelle est basée sur la diminution de l'anxiété et l'instauration d'une relation de confiance. Ce travail est de longue haleine et difficile, car une personne atteinte de schizophrénie se sent seule, mais rejette souvent la proximité (selon Kaplan et Sadock, 1998). Il vaut mieux baser l'intervention sur l'honnêteté et le respect des rythmes du patient.

La thérapie comportementale est un bon étai dans la prise en charge de patients schizophréniques. Son but principal est de réduire les comportements déviants tout en augmentant la place des comportements appropriés. C'est une thérapie qui découle principalement des travaux de Skinner et de Pavlov (respectivement psychologue américain et médecin physiologiste russe).

  • Le traitement social
Les différents outils sont ici la thérapie par le milieu et la thérapie familiale. Skinner (1979) définit la thérapie par le milieu de la manière suivante : " Structuration de l'environnement pour opérer des changements comportementaux et pour améliorer la santé psychologique et le fonctionnement de l'individu ".
Il s'agit donc d'adapter l'environnement afin que l'hospitalisation d'un patient soit thérapeutique à tous les égards (favoriser la prise de décision des patients dans le fonctionnement d'une unité de soins, responsabilisation des comportements, favoriser le dialogue lors de toutes interactions, bénéfiques ou non etc.).
Dans la thérapie familiale, on cherche à ce que la famille d'un schizophrène devienne une ressource primordiale. En soutenant la famille et en la sensibilisant au vécu du patient, on optimise, d'une part, les chances de stabilisation, et d'autre part, on diminue les risques de rechute.
Quelques exemple d'actions propres à la thérapie familiale : réduire le stress familial, notament par le dialogue, favoriser la mise en place de réseau d'aide et de soutien, enseigner des compétences propres à la prise en charge de personnes schizophrènes, assurer le maintien de ces compétences et j'en passe, par pur souci de longueur de texte.

  • Le traitement biologique
Les neuroleptiques (=antipsychotiques) sont les médicaments-phare dans le traitement de la schizophrénie. Ils en traitent les manifestations aiguës et chroniques. Cependant, on peut observer l'apparition d'effets secondaires graves lors d'une utilisation à long terme. Pour lutter contre cela, la prescription de médicaments antiparkinsoniens s'impose.

Il est nécessaire de préciser qu'en aucun cas un traitement médicamenteux est miraculeux. Il doit être combiné à une psychothérapie et à une thérapie sociale.
Deux avantages majeurs : améliorer la qualité de vie du patient en diminuant les symptômes positifs et négatifs de la maladie, et permettre au patient d'entrer plus facilement en relation avec l'autre, ce qui potentialise les thérapies psychologique et sociale.

Enfin, abordons les différents types de schizophrénie. Il y en a 4 principaux :

  • La schizophrénie désorganisée (anciennement appelée hébéphrénique): elle suit une évolution chronique. Le comportement est régressif et primitif. Perte de contact avec la réalité et affect plat.

  • La schizophrénie catatonique : on observe des anomalies au niveau du comportement moteur. La maladie prend souvent la forme d'une stupeur ou d'une surexcitation.

  • La schizophrénie paranoïde : elle se caractérise par des idées délirantes (délire de persécution ou d'influence) ou à des hallucinations auditives associées à des thèmes uniques. La personne est alors défavorisée sur le plan socio-professionnel et relationnel.

  • La schizophrénie indiférenciée : la personne présente des symptômes qui ne permettent pas de préciser le type de schizophrénie. C'est en quelque sorte un pot-pourri des symptômes cités ci-dessus.

Je vais m'arrêter là... Désolé pour cette précision massive, mais je l'ai faite sur demande... Eragon, j'espère avoir pu traiter de manière globale mais suffisante les thèmes que tu as soulevés.

Amicalement, El.


~Eldarion~

 

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