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Paradoxe d'Epiménide

Ici, je propose des éléments pouvant aider à résoudre le fameux paradoxe d'Epiménide. Je ne prétends pas que ma solution est unique.


Epiménide, un Crétois, affirme : "Tous les Crétois sont des menteurs."

Première approche :
Si "menteur" est pris au sens courant de "quelqu'un qui a l'habitude de mentir"(Larousse) ; il n'y a pas de paradoxe, car avoir l'habitude de mentir ne signifie pas être toujours en train de mentir, mentir à chaque parole. Donc, Epiménide, même Crétois, peut éventuellement dire vrai ou mentir, sans que cela compromette sa "qualité" de menteur. Il n'y a pas de paradoxe.

Deuxième approche:
Prenons maintenant le mot "menteur" au sens de quelqu'un qui ment toujours. La phrase d'Epiménide pourrait alors s'écrire : "Tout ce que dit un Crétois est mensonge."
Et c'est là que les partisans du "paradoxe d'Epiménide" ont fait apparaître un paradoxe là où il n'y en a pas. Considérons leur "raisonnement" :

Si je dis qu'Epiménide a dit vrai, je dis aussi qu'un Crétois (Epiménide) vient de dire la vérité. Or, si c'est une vérité, le Crétois en question a nécessairement menti quand il a dit que tout ce que disent les Crétois est mensonge, donc il n'a pas dit vrai : contradiction !
Mais si je dis qu'Epiménide a menti, c'est donc que - et c'est là qu'apparaît la faille de la démarche - j'ai cru qu'Epiménide a dit vrai lorsqu'il a affirmé qu'un Crétois ne pouvait que mentir. D'où l'autre contradiction, et par suite de ce caractère indéterminé (ni vrai, ni faux) : paradoxe !

S'il est vrai que la première partie du raisonnement peut tenir, la seconde elle est très grossière. Car d'une part, que je dise qu'Epiménide a menti ne donne à personne le droit de conclure que je l'ai déduit de ce qu'Epiménide a dit dans la citation. Je peux avoir eu d'autres raisons (et c'est le cas) m'ayant motivé. D'autre part, qu'Epiménide mente ne prouve pas que "tout ce que dit un Crétois est mensonge" donc qu'Epiménide disait vrai.

Encore l'on admettra que, quand bien même Epiménide mentait en disant que "tout ce que dit un Crétois est mensonge", cela ne prouverait même pas que "tout ce que dit Epiménide est mensonge"! (Voire "tout ce que dit un Crétois" en général !)
Et enfin il ne peut y avoir contradiction si je pense qu'Epiménide ment car la négation de "tout ce que dit un Crétois est mensonge" n'est pas "tout ce que dit un Crétois est vérité".


Récapitulons :
Si Epiménide dit vrai, on aboutit indubitablement à une contradiction -on l'a montré. Donc il ne peut avoir dit vrai. Mais s'il ment cela ne nous mène pas inévitablement à une contradiction -à moins de se soumettre aux caprices du faux raisonnement de certains partisans arbitraires du paradoxe. Et comme la vérité de la proposition est déjà à écarter l'on est d'autant plus porté à croire qu'Epiménide a menti !

De toute façon l'on ne pourrait jamais démontrer que "tout ce que dit un Crétois est mensonge" (passé, présent, futur) car, quand bien même une enquête viendrait à montrer que tout ce que dit un Crétois est mensonge, l'enquête n'aurait en fait démontré que ceci : tout ce qu'a dit un Crétois est mensonge ! Aucune garantie pour l'avenir...

 
 
~Turing~
Publié le : 21/07/2011

 

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Bien ton article mais que dis-tu de "cette phrase est fausse"?


~julcap10~ le 14-08-2011 à 22:27
 

Cette phrase est fausse.

1) Solution banale : la phrase dont on parle ici est une autre phrase. Il n'y a pas de paradoxe !

2) Solution pratique : il suffit parfois de reformuler un paradoxe (sans en changer le sens) pour le faire disparaître. En l’occurrence, nous pouvons reformuler le fameux paradoxe comme suit : ‘’La phrase « Cette phrase est fausse » est fausse. ‘’Et où est passé le paradoxe ?

3) Approche linguistique :
La particule "cette phrase" ne saurait être une phrase à part entière. Certes, elle désigne une phrase, mais de là à dire que parce qu'elle en désigne une elle en est une, il y a un pas que je ne franchirai pas. Ici, cette phrase joue le rôle d'un signifiant (par abus de langage) servant à désigner un signifié, l’idée d’une phrase donnée. La question est maintenant de savoir si ce signifié est la phrase "Cette phrase est fausse", ou une autre phrase. Si c'est une autre phrase, on revient à 1),pas de paradoxe.

Mais s'il s'agit de la phrase "Cette phrase est fausse", il n'y a pas de paradoxe non plus. Pourquoi? D’abord, constatons qu’en général un signifiant n’EST pas son signifié. Par exemple le mot chat, écrit ou prononcé, n’est pas un chat. Mais qui plus est, même s’il y avait un chat là sous mes yeux vivants, ce ne serait pas non plus le signifié. Le signifié est abstrait, c’est l’ « idée » même de chat.
Or aucun chat réel ne correspond exactement à cette idée. Tel chat sera noir, tel autre blanc, alors que mon chat idéal n’est ni noir ni blanc. Pour résumer, nous dirons qu’en général l’objet réel possède toujours des propriétés que le signifié qui l’idéalise ne possède pas. Dans notre cas, nous noterons que cette phrase (à savoir « cette phrase est fausse ») ne désigne qu’une phrase idéale, dont la représentation réelle serait « cette phrase est fausse ». Alors qu’est-ce qui est faux, l’idée ou la représentation de l’idée ? Ce ne peut être la représentation réelle, car la représentation n’est pas spécifique à l’idée et n’est qu’une « chose ». La vérité sémantique porte sur les idées, pas sur les des objets réels.


~Turing~ le 25-09-2011 à 22:20
 

Belle démonstration en tout cas, mais je tiens à dire qu'en ce moment, je mens. ;)


~Loreol~ le 26-03-2013 à 19:43
 
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