Marcel Duchamp
90% de l'art contemporain d'aujourd'hui n'existerait pas sans lui : signatures sur bâtiment (Tag), body art (coupe de cheveux tectonik), mail art...
Cet artiste privilégie l'intelligence et la polysémie de l'œuvre (plusieurs sens), et en néglige caractère visuel ou séduisant . Il est né en pleine période de l'impressionnisme, ce qui se fait sentir dans ses premières œuvres (« Homme assis près d'une fenêtre » 1907). André Breton parle de Marcel Duchamp en disant «c'est l'homme le plus intelligent du siècle », car la qualité intellectuelle n'est pas la première qui vient à un artiste, contrairement au fait d'être créatif.
À cette époque, les peintres enseignaient à leurs élèves comment peindre de la même façon qu'eux. Marcel Duchamp va refuser cette règle de la filiation. C'est justement ce Marcel Duchamp qui a fait le plus d'épigones (élèves) car 90% de l'art contemporain occidental n'existerait pas s'il n'avait pas vécu ! Il a fait éclater toutes les définitions de l'art.
Depuis Marcel Duchamp, l'art est devenu un champ de tous les possibles. Il fait une économie de moyen mais laisse tout à penser, tout à dire, et multiplie les significations.
On se débarrasse des idées reçues sur ce qui est de l'art et pas de l'art, l'esthétique, le beau. Baudelaire a dit « le beau est toujours bizarre ». On se défait de l'idée d'un rapport entre art et artisanat (ce que fait la main de l'homme).
Marcel Duchamp est né à Rouen. Il avait 2 frères peintres et 3 sœurs. Il obtient le premier prix en maths à 15 ans et de dessin à 16 ans. Ces parents ne s'opposent pas à ce qu'il soit artiste lui aussi. En 1905 il est refusé aux Beaux-arts et se lance alors dans la caricature. Il obtient son diplôme d'ouvrier d'art. En 1907 il fait sa première exposition des artistes humoristes. Il se moque de l'art en réalisant une Joconde avec moustache et barbichette « LHOOQ ». Il est iconoclaste (il se moque des images). Il y a beaucoup d'humour dans Marcel Duchamp, mais il est aussi un fainéant intelligent.
En 1912, donc en plein cubisme (Picasso), il réalise « Nu descendant l'escalier n°2 » où il réunit plusieurs temps sur une même image ; c'est l'art cinétique (mouvement). Son œuvre fut refusée car il s'agissait d'un cubisme nu, ce qui fut pris comme une moquerie. Même s'il s'agit d'une image statique du mouvement, c'est l'œil du spectateur qui incorpore le mouvement au tableau, « C'est le regardeur qui fait le tableau » (« Étant donné : 1° la chute d'eau, 2° le gaz d'éclairage » 1944).
En 1912 il va à un salon de locomotion aérien avec Brancusi, à qui il déclare : « C'est fini la peinture : qui ferait mieux que cette hélice ? ». En effet, les moyens techniques de l'industrie au niveau finition, beauté des courbes, ne vont-ils pas dépasser l'art ? L'artiste voit la beauté là où les gens ne la voient pas. Si l'on oublie le coté fonctionnel de l'objet, il y a une vrai beauté dedans.
Tout a un sens chez Marcel Duchamp, d'où l'importance du titre : «Le Roi et la Reine entourés de nus vites ». Il joue (toujours) avec les mots (« Fresh widows » soit « veuves joyeuses » au lieu de « French Windows »). Le titre contribue à l'œuvre : « La Mariée mise à nu par ses célibataires, même ».
« Les 3 Stoppages tirés étalant » : il s'agit de trois rubans de mètre de référence que Marcel Duchamp a laissé tomber au sol. Il est son propre « maître », « c'est du hasard en conserve ». Extrême intelligence mais extrême facilité.
Marcel Duchamp a dit : « Si seulement l'Amérique voulait réaliser que l'art Européen est mort et que l'Amérique est l'art de demain ». Exemple : les gratte-ciel, écrasant paysage de montagne qui nous dépasse, nous domine. Il a voulu signer un bulding mais sa proposition fut refusée.
Une de ses œuvres la plus connue est la fameuse « Fontaine (1917) » qui est en fait un urinoir qu'il a déposé sous le nom de R. Mut et qui fut refusé par la commission. Il révéla alors sa vraie identité et la commission changea subitement d'avis, mais il préféra démissionner. Sa dernière peinture fut « Tu m' » en 1918, puis il se consacra à sa passion : les échecs.
Il effectua des œuvres par correspondance, et donc donna naissance au mail art (« Air de Paris »). Il prit un pseudonyme : Rrose Sélavy. Il se déguisa en femme et, se considérant comme une œuvre d'art, utilisa son propre corps ; c'est la naissance du body art. Il se fit aussi raser le crâne en forme d'étoile filante. Aujourd'hui l'art contemporain est constitué de 3% de mail art et 10% de body art.
L'œuvre qui lui prit toute sa vie fut « Le grand verre » qu'il n'arrivait pas à finir et qu'il retrouva par hasard chez lui recouvert de poussière, donnant naissance à « Élevage de poussière ». Il publia en 1924 « 17 jeux de mots sur Rrose Sélavy » du genre « Eros c'est la vie ou encore « Rrose Sélavy et moi esquivons les ecchymoses des esquimaux aux mots exquis. ». En 1960 ses calembours deviennent des œuvres : « Si la scie scie la scie/ et si la scie qui scie la scie/ est la scie qui scie la scie/ il y a suissscide métallique ».
En 1951 il rentre au collège de Pataphysique le 24 tatane 79 (6 août 51 après JC), fondée en 1948 après la mort d'Alfred Jarry, l'écrivain de « Ubu roi », qui disait : « La pataphysique, c'est la science des solutions imaginaires qui accordent symboliquement aux linéaments les propriétés des objets décrits par leur visualité ». Si le dadaïsme remet en cause le positivisme mais violemment, la pataphysique la remet aussi en cause, mais de manière dérisoire et intelligente.
Bilan de sa vie selon lui : « Grâce à ma chance, j'ai pu passé à travers les gouttes [...] il ne faut pas alourdir sa vie de trop de poids, [...] c'est-à-dire une femme, des enfants, une maison de campagne, une auto [...] je l'ai compris assez vite ce qui m'a permis de vivre longtemps [...] je n'ai jamais eu de [...] neurasthénie. Toute ma vie j'aurais voulu travailler mais il avait en moi un fond de paresse énorme [...] je ne pense pas que ce que j'ai fait ait une importance sociale [...] donc si vous voulez mon art serait de vivre chaque seconde, chaque respiration est une œuvre qui n'est inscrite nulle part, qui n'est ni visuelle ni cérébrale. C'est une sorte d'euphorie constante. ». Il meurt à l'âge de 80 ans, le 2 octobre 1968, d'une embolie . Sur son épitaphe est marqué : « D'ailleurs c'est toujours les autres qui meurent ».
~Elfe-avariel~
Publié le : 30/11/2008
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