La nature d'un regard
Contempler notre présent est certainement un moyen de préparer notre devenir.
Je regardais l'horizon, l'entre-deux, entre ciel et terre ou terre et ciel.
Je songeais, moi petit trait vertical respirant l'air de ma planète.
Je dis " je songeais", mais en fait tel n'est pas vraiment le mot.
J'étais là, je regardais et j'écoutais.
Il y avait devant mes yeux les astres du ciel et sous mon nez les odeurs de la Terre.
Les astres semblaient jetés dans le froid intersidéral pourtant j'en savais certains bien plus que chauds.
Dans mon nez, les parfums terrestres eux aussi semblaient doués de fraîcheur ou chaleur.
Le petit trait vertical que j'étais et que je suis encore semblait un trait d'union entre terre et ciel où ciel et terre.
Je me prenais à penser que l'atmosphère terrestre était à l'image des pensées qui animent un homme.
Comme une sorte d'aura, fine pellicule éthérique parfumée des humeurs de l'instant.
Mes ancêtres étaient habitués de ces moments, il me l'avait dit.
Ainsi j'étais conscient de contempler une petite partie de l'éternité.
Puisque l'éternité était offerte à mes yeux et les parfums de la saison à mon nez,
j'essayais de vivre l'instant tout en le regardant tendre vers l'instant qui devait lui succéder.
Mais pourquoi donc essayer de déborder l'instant présent ?
Était -ce la le propre de l'homme ?
je me disais que oui puisque tel était mon aspiration, ma tendance naturelle ou intellectuelle.
Avais-je tort ou était-il schismatique de tenter de comprendre le sablier du temps ?
Pressentir l'instant suivant, pour mieux l'accueillir ?
Pressentir l'instant suivant pour le comparer à celui qui vient de s'écouler ?
Pressentir l'instant suivant pour mieux le manipuler ?
Peut-être tout simplement pour s'assurer qu'il vient vraiment...
Les arbres continuaient à parler avec la brise légère,
les insectes s'occupaient , et doucement dans le ciel les astres suivaient la course.
La vie s'étalait, je contemplais le tableau, je participais, cela était fort agréable.
Je me demandais alors lesquels de ces acteurs étaient conscients de leur rôle.
Je considérais que le temps des astres n'était pas le même que celui des insectes.
Pourtant ils étaient simultanés...
Les insectes ne se souciaient pas de l'astre, et probablement que l'astre n'avait que faire de l'insecte.
Pourquoi alors cela m'importait-t-il ?
Quelle différence entre eux et moi ?
Mon rôle était-il d'en être conscient pour eux, de les synthétiser ?
Tout ce tableau de vie était profondément mien, un lien indéfectible unissait l'ensemble des acteurs, conscients ou non de leur statut ou même de leur présence dans le tableau.
Ces questions égrenant les instants qui se succédaient me conduisaient,
vous vous en doutez, à une autre question.
Cette dernière ne semblait être en mesure de répondre à celles qui précédaient.
Était-ce mon regard posé sur le tableau qui le peignait au fur et à mesure de mon interprétation ?
Il me semblait bien que oui... Il est vrai que nos pensées,
nos regards influencent le cours de nos vies et par voie de faits l'ensemble du tableau.
Ainsi, la contemplation impliquait un regard responsable et conscient.
Étant donné la quantité d'êtres humains présents sur cette terre,
je considérais alors l'importance du regard de chacun et de l'orientation de ses pensées
dans la nature du tableau qui constitue notre présent.
J'en venais donc à me dire, vu le tableau présent,
qu'il était indispensable de nous donner les moyens de regarder ce tableau avec amour, afin de l'y voir apparaître...
Chaque touche d'amour posé sur le tableau, partagé par une multitude d'êtres humains,
permettait à ceux d'entre eux qui voulaient découvrir l'amour d'en trouver une touche, une représentation.
Les règles régissant l'élaboration de l'oeuvre semblaient magnifiques et logiques. Si elles étaient fondées, elles ouvraient des perspectives incroyables, qui débordaient très largement les limites apparentes du tableau ! J'étais là, scrutant l'horizon et la course du temps, petit trait vertical perdu dans un coin de nature, essayant de faire rentrer en lui ces incroyables perspectives.
Indéniablement il m'était difficile d'être aussi large que l'oeuvre que je tentai d'accueillir !
De toute façon, être un homme me suffisait, pourquoi vouloir posséder ce qui nous est offert ! Je restais donc planté là, comme une vache au bord de sa clôture, contemplant le long convoi de mes questions-réponses, ruminant les brins d'herbes que je parvenais à saisir !
Non, franchement, il y a des moments où je me demande si ça vaut le coup vraiment de se prendre la tête ! Bonne rumination à toutes et tous, paix des bocages et silence intersidéral !
~Benoitcamares~
Publié le : 16/12/2008
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