Effet Placebo

Ou l'auto-suggestion appliquée à la médecine.


D'où vient le mot Placebo ?

Placebo vient du latin : " je plairai ", sous-entendu : " à qui me demande de prescrire... "

Qu'est ce que l'Effet Placebo ?

L'effet placebo est le résultat d'un procédé thérapeutique absolument sans efficacité, mais agissant par un mécanisme psychologique, si le sujet est persuadé de recevoir un traitement actif. Autrement dit : " ça marche juste parce que l'on m'a dit que ça marchait et que j'y crois."

Donc c'est quoi un placebo ?

Un médicament placebo ne contient aucun composé chimique pouvant agir sur la maladie du patient : ça peut être de l'eau sucrée ! Mais la suggestion engendrée par le cerveau du patient entraîne la plupart du temps une guérison complète ou partielle spontanée des symptômes maladifs. Les effets du placebo ont d'ailleurs été décrits dans le cadre d'études pharmacologiques ! Beaucoup de symptômes fonctionnels sont très bien corrigés par divers placebos. Parmi les catégories de symptômes, les douleurs en général, les réactions de type allergique comme le rhume des foins et l'eczéma, l'insomnie, les troubles de l'appétit... représentent une liste non exhaustive de symptômes plus particulièrement sensibles à l'effet placebo.

Un placebo remplace-t-il seulement les médicaments ?

Non, le placebo ne se présente pas uniquement sous la forme d'un médicament : il peut s'agir d'une opération chirurgicale, d'un traitement physiothérapeutique, et de toute autre intervention thérapeutique. Si celles-ci sont mal conduites, ou inadéquates mais qu'elles produisent quand même un résultat, on pourra dire qu'il s'agit d'un Placebo.

Peut-on avoir un Effet Placebo avec un traitement thérapeutique " normal " ?

Oui, tout geste thérapeutique valide comporte une part significative d'effet placebo. Il faut déjà savoir que 50% des symptômes maladifs sont psychosomatiques. Un individu vivant une période troubles ou de dépression sera toujours plus enclin à tomber malade qu'un individu en "bonne santé psychique"

De quels facteurs dépend l'effet placebo ?

Dans ce secteur-là, les chercheurs tâtonnent avec peu de certitudes. Certains ont trouvé une relation entre le caractère non fumeur, le niveau d'instruction, le métier, le statut marital, le nombre d'enfants d'une part et d'autre part la placebo-sensibilité.
D'autres trouvent une liaison entre sexe, intelligence, et réponse au placebo.
Ce qui est sûr, c'est que l'efficacité d'un effet placebo dépend de l'attitude de l'équipe soignante, et tout particulièrement de la qualité de la relation médecin-malade.
Il est un fait que les médecins optimistes obtiennent de meilleurs résultats que les médecins pessimistes. La croyance du médecin en l'efficacité de son traitement et la confiance du patient à son égard agissent en synergie l'un sur l'autre. Lorsqu'on discute de l'effet placebo, on incrimine toujours la crédulité des malades, mais on ignore souvent la façon dont les médecins s'illusionnent eux-mêmes : le charlatan chaleureux est souvent plus efficace que le scientifique sceptique. La voie d'administration est également importante puisque l'on sait intuitivement que les injections ou perfusions ont une efficacité plus grande que la voie orale.

Y a-t-il des circonstances qui influencent négativement l'effet placebo ?

Dans le domaine de la douleur, il est certain que l'effet placebo peut être annihilé par l'administration de Naloxone, un produit dont l'action bloque les endorphines. Si le corps n'en produit plus, il est impossible au sujet de lutter contre la douleur. L'ancienneté de la malade ou des symptômes et l'essai de plusieurs traitements antérieurs sans résultats peuvent jouer un rôle négatif sur la sensibilité au Placebo.

L'effet placebo est-il reconnue dans les milieux universitaires ?

Malgré son rôle essentiel dans la pratique médicale, la place occupée par le placebo dans l'enseignement médical est presque nulle. Cette situation s'explique sans doute par le fait que les médecins tendent à nier l'importance de l'effet placebo, car admettre son importance met en danger leur image et leur pouvoir. Que se passerait-il si l'on apprenait qu'un peu d'eau colorée pourrait être aussi efficace qu'un médicament onéreux ?

Existe-t-il un effet inverse à l'effet placebo ?

Oui, les placebos amènent parfois des effets négatifs sur certains individus. Ce phénomène a été regroupé sous le nom d'effet nocebo.
Voici dans l'ordre les symptômes négatifs rencontrés après l'administration d'un placebo : somnolence : 24,7 % ; fatigue : 17,2 % ; troubles gastriques et intestinaux : 16 % ; difficultés de concentration : 13,2 % ; céphalées : 11,6 % ; bouffées de chaleur : 11,4 % ; tremblements : 11 %. Les effets dépendent bien entendu du type de placebo administré et de la personnalité du patient. L'élément le plus déterminant restant les symptômes cibles : s'il s'agit d'un placebo d'antidépresseur, les effets indésirables seront certainement différents de ceux d'un placebo d'antidouleur. Cela est dû au fait qu'un patient ayant déjà consommé des anti-dépresseurs par exemple, aura connu un certain type d'effets secondaires, et son organisme aura tendance à suggérer ces effets si on lui administre un placebo d'anti-dépresseur.
Cas encore plus significatif : lors du début de la période de recherche sur les effets négatifs des ondes téléphoniques, on a ainsi observé l'apparition de troubles chez des individus habitant près d'une antenne de radiotéléphonie. Cette antenne n'avait pas encore été mise en service, et n'aurait pu donc avoir aucun effet sur les riverains ! Il s'agit donc d'un effet nocebo.


Précisons que c'est Bernheim qui a mis en lumière l'effet placebo au début du 19ème siècle, lors de ses recherches sur l'hypnose.

Pour finir, nous pouvons noter que le groupe de musique Placebo doit bien son nom à ce phénomène. Les titres de certains de leurs albums ne s'éloignent d'ailleurs pas de ce thème riche en réflexions potentielles : Without You I'm Nothing renvoit à la dépendance d'un individu pour un Placebo, Sleeping with Ghost peut nous faire penser à l'angoisse due à un effet nocebo. Quant au dernier en date, Meds, il est le diminutif de medications, pour médicaments.

 
 
~Isator~ Publié le : 28/08/2006

Très complet cet article Isator . Un des exemples les plus flagrants de l'effet placebo est peut être ce que l'on nomme l'homéopathie. Ici aussi la médecine moderne est plus que sceptique à l'égard de cette méthode qu'elle considère comme une pseudo-science. En effet le principe est de "dynamiser" une substance provoquant chez un sujet sain le même ensemble de symptômes que présente l'individu souffrant, mais cette "dynamisation" consiste à diluer le principe actif et de répéter cette dilution de très nombreuses fois (Imaginer 1 mL de substance dilué dans 1 L d'eau, puis 1 mL de ce mélange dilué à nouveau dans 1 L d'eau, puis 1 mL de ce nouveau mélange dilué ... et ainsi de suite des centaines de fois). A la fin de l'opération il ne reste donc plus rien de ce principe actif dans les granules, qui ne contienne plus que du sucre. Et pourtant nombreux sont ceux qui se soignent par l'homéopathie et reconnaissent des effets réels sur leur symptômes. L'effet placebo est un des exemples de la puissance de notre esprit sur notre corps. Il suffit de le vouloir.

~Nicolas~

 

Contrairement à l'effet placebo qui effectivement repose sur beaucoup de symptômes psycho-somatiques (comme l'a très bien expliqué Isator ), l'homéopathie ne fonctionne pas exactement de la même façon, désolé Nicolas.
Pour remédier à cette croyance, je vous conseille deux livres

• L'univers informé, de Lynne McTaggart, ISBN 2920987941,
• Ma vérité sur la mémoire de l'eau, de Jacques Benveniste, ISBN 2226158774.

Certaines expériences décrites dans ces livres sont assez troublantes pour vous faire changer d'avis...

~Gwendhal~

 

Bonjour, et merci pour ces échanges très intéressants sur l'effet placebo et l'effet nocebo, moins connu.

Ce qui me frappe beaucoup, c'est la remarque sur l'intérêt bien compris de la médecine classique à minimiser l'effet placebo.

Plus généralement, la médecine dite "moderne" minimise très souvent les interactions du psychisme et du corps, et leurs effets sur la santé, qui sont à mon avis pourtant énormes. Il est facile à tout un chacun de constater que l'on attrape plus facilement un microbe ou un virus qui traîne lorsqu'on est fatigué ou/et déprimé.

La fatigue est d'ailleurs elle-même un phénomène très lié au moral : selon que je me suis amusée ou ennuyée, je ne vis pas de la même manière le déficit de sommeil engendré par une soirée qui a bien écourté ma nuit : dans un cas, je suis plus ou moins raplapla et grognon, dans l'autre, pleine d'énergie et zen.

De gros intérêts financiers (notamment pour l'industrie pharmaceutique) s'opposent à ce que les effets du psychisme sur la santé soient pris en compte par les médecins, sans compter en effet leur sacro-saint pouvoir.

C'est bien pour ça que la médecine allopathique (que j'ai aussi appelée "moderne", celle qui soigne essentiellement avec des médicaments chimiques) ne sait pratiquement rien sur les causes des maladies et s'applique à soigner principalement les conséquences, les symptômes.

Je ne veux pas jeter le bébé avec l'eau du bain, il y a aussi de grandes réussites de la médecine allopathique, notamment sur le plan chirurgical (c'est sûr que c'est plus intelligent d'opérer quelqu'un qui a une crise d'appendicite que de le laisser mourir d'une péritonite, par exemple...).

Mais bon, je trouve qu'elle devrait se préoccuper en priorité des causes des maladies, pour pouvoir faire plus de prévention, et pas juste de leurs conséquences pour trouver des molécules qui les contrecarrent.

D'ailleurs, j'ai lu quelque part que dans la Chine antique, les médecins étaient payés si les gens restaient en bonne santé, pas s'ils tombaient malades : leur boulot était de prodiguer des conseils de vie pour maintenir la santé, plus que de soigner les malades. Une fois malades, les patients étaient donc soignés gratuitement.

Ca fait réfléchir, non ?

~Louise~

 

Article intéressant, mais un point me chagrine : tu parles de non-considération du domaine médical sur les médicaments placebo; je suis actuellement en cursus médical et c'est un sujet de cours.
Il peut apparaître extérieurement que le monde médical refuse l'homéopathie : cela est principalement dû au fait que la médecine est une science. La médecine rationnelle se fonde peu sur l'empirisme de telles méthodes, sans pour autant les réfuter, car l'effet placebo est déjà employé (ne serait-ce que l'effet blouse blanche, ou l'attitude réconfortante du médecin).
Quoi qu'il en soit, il n'y a pas de dédain : c'est surtout l'idée d'employer des techniques non testées (car oui, les firmes pharmaceutiques ne font pas subir toutes les batteries de tests communes aux médicaments ordinaires à l'homéopathie) et il faudrait employer ça sur des patients ? Comment va réagir la psyché du patient ?
En effet, les medecins (pour la plupart) se refusent à employer des méthodes dont l'effet ne peut être dans une certaine mesure calculé et quantifié. L'accent nous a bien été mis durant le cours sur le fait qu'il faut chercher en quoi réside le pouvoir de guérison du placebo (comment mesurer la psyché ?) car il renferme un grand potentiel que nous ne sommes en mesure pour le moment de contrôler.
Les recherches dans ce domaine sont assez peu élevées, et je tiens à signaler le fait que je ne veux pas "rejeter la pierre lancée sur le corps médical aux firmes pharmaceutiques", car s'il n'y a pas de tests, c'est qu'ils sont très compliqués à mettre en oeuvre : comment mesurer l'impact d'un effet purement psychologique?
Il faut logiquement que toutes les conditions soient réunies pour le quantifier : que le patient croit avoir un vrai médicament, que le médecin croit prescrire un vrai médicament (étude en double aveugle, pour éviter un hypothétique comportement du médecin, une suspicion du patient...)
Il faut aussi trouver les cas cliniques adéquats, il faut encore que le médicament prescrit soit ressemblant à un vrai medicament (en terme de goût, de forme, de couleur) ce qui n'est pas si facile, et nécessite de l'argent (pour créer la forme, le goût sans l'effet de molécules parfois complexes).
C'est donc une non-application, en général, de ce type de médication, et les effets ne sont pas prévisibles...

Accepteriez-vous d'être soignés par un médicament où l'on vous dirait que les risques ne sont pas calculés ? Pas forcément..
Et si en plus on vous dit que ce médicament n'a aucun principe actif, le pseudo-médicament perd de sa valeur instantanément...

C'est donc une question épineuse que la médecine n'a pour le moment pas les moyens de gérer et donc préfère attendre des études sur le sujet.

Ceci est tiré pour la plupart d'un cours de médecine, plus une réflexion personnelle, en ce qui concerne les sources; je tiendrais juste à ajouter que la remarque sur le "pouvoir jalousement gardé des médecins" est plutôt subjective, ou alors je te demande de m'éclairer à ce sujet (je n'ai pas d'oeillères, si tu as des choses concrètes à me montrer je les verrai volontiers !).

Le ton de mon article a pu paraître un peu abrupt, je m'en excuse si cela blesse quelqu'un !

~M.Egérivem~