La question de Dieu
"Crois-tu en Dieu ?" ou "Dieu existe t-il ?" sont deux questions rituelles. Je propose d'en établir une nouvelle, plus "intelligente".
La bonne question à se poser, ce n'est pas " Dieu existe t-il ? " ou " Crois-tu en Dieu ? ", qui sont des questions fermées à laquelle on ne peut répondre que par " oui " ou par " non ".
La fameuse question d'Einstein (" Définissez-moi d'abord Dieu et je vous répondrais ensuite ") est également difficile à répondre, car la question de la définition est une conséquence de la réponse.
Il faut donc se poser la question suivante : " Qu'a fait Dieu ? ".
Dans ce cas, il existe tout un champ de réponses possibles qui vont de tout à rien ; si l'on pose 100 pour le tout (position du " croyant absolu ") et 0 pour le rien (position de l'" athée "), on s'aperçoit que selon nos croyances, nos convictions, nos réflexions, il existe une infinité de réponses. Je me définis moi-même comme " agnostique " : lors de ma vie, j'ai toujours oscillé autour de 50. En ce moment, je suis à près de 60.
Il permet aussi de se poser la question d'une définition de " Dieu ". Est-il pur esprit immatériel, créateur " de la terre et du ciel ", responsable d'une pulsion initiale, responsable de toute vie, maître de nos actes, juge de nos actes, bourreau lors de notre mort etc... ?
Pourquoi pas moins de 60 ? L'été dernier, j'ai lu le fameux ouvrage de Jacques Monod, Le Hasard et la nécessité (1970, Seuil, coll. Points sciences). Pour ce biologiste-philosophe, la probabilité d'existence de la biosphère, c'est-à-dire de l'apparition de la vie, est proche de zéro. Il réfute cependant l'idée d'un " destin " immanent, " notre tendance humaine à croire que toute chose réelle dans l'univers actuel était nécessaire, et de tout temps ".
De même pour l'apparition de l'être humain : " S'il fut unique, comme peut-être le fut l'apparition de la vie elle-même, c'est qu'avant de paraître, ses chances étaient quasi nulles. L'Univers n'était pas gros de la vie, ni la biosphère de l'homme. Notre numéro est sorti gagnant au jeu de Monte-Carlo. Quoi d'étonnant à ce que, tel celui qui vient d'y gagner un milliard, nous éprouvions l'étrangeté de notre condition ? "
Il conclut ainsi par cette phrase demeurée célèbre : " L'homme finalement se rend compte qu'il est seul dans l'immensité impitoyable de l'univers, duquel il a émergé purement par hasard. Ni son destin, ni son devoir n'ont été consignés par écrit. C'est à lui de choisir : soit le royaume des cieux, soit les ténèbres ici-bas. "
En fait, Monod ne prend en compte que l'aspect biologique de ce qui est et a été sur Terre ; il y a en fait de nombreux hasards :
* Les hasards de l'Univers (hasards astronomique) ;
* Les hasards des lois physiques et chimiques (hasard physico-chimique) ;
* Les hasards de la Terre (hasards géologiques et géographiques) ;
* Les hasards de la Vie (hasard biologique) ;
* Les hasards de l'émergence humaine (hasards anthropologiques) ;
* Les hasards de la conscience (hasards ???) ;
* Les hasards de l'histoire humaine (hasards historiques) ;
* Les hasards ayant présidé à notre lignée jusqu'à nous-mêmes (hasards humains).
Si les hasards astronomique et les hasards anthropologique sont proches de 0, les autres aussi et cela est encore plus " étrange ".
Il y a donc beaucoup trop de " hasards " pour moi et je ne me sens pas capable d'accepter cela " mathématiquement ". C'est pourquoi je pense que Dieu existe à un degré 60, indépendamment de toute religion bien entendu.
Pourquoi pas plus ?
* Parce que je me sens en grande partie responsable de ma vie ;
* Parce que je ne peux pas imaginer un Dieu sadique s'amusant de ma vie ;
* Parce que je ne crois pas à un Dieu responsable de vies horribles ;
* Parce que je ne crois pas à un Dieu juge de mes actes ;
* Parce que je ne crois pas à une " récompense " ou à une " punition " après ma mort.
Si quelqu'un veut m'aider à trouver le mot manquant pour les hasards de la conscience, " instinct divin " selon Rousseau (Profession de foi du Vicaire savoyard in L'Émile), je l'en remercie.
~maestro~
Publié le : 01/07/2007
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